Composer un décor peint avec des fausses moulures en technique acrylique


La fausse moulure est l’imitation peinte en trompe l’oeil des reliefs des moulures, par les filets secs ou dégradés, technique venue de l’antiquité.
La peinture (ou pigments) est solidifiée par un liant ou l’autre. Ces liants, variés, dépendent des choix et habitudes des pays et de leurs époques ; depuis l’antiquité, chaux, caséine, cire, plus tard vernis, puis huile, enfin acrylique, etc….
Le rendu aussi, de la suggestion à l’hyperréalisme, a suivi le mouvement de l’histoire de la peinture.

Il existe d’innombrables dessins de profils*, combinant des parties plates, convexes ou concaves, ornées ou non. Cependant, l’étude et la connaissance des 3 ou 4 profils les plus courants donnent les bases pour en composer de plus complexes.

La qualité d’une composition de décor peint en trompe l’oeil tient à :

  • l’adéquation du style, des couleurs et valeurs, au contexte
  • la justesse des proportions (des éléments créés)
  • l’équilibre des associations
  • la cohérence de l’ensemble du décor (style, couleurs entre elles, valeurs)

Connaitre le modus operandi
1- Matériel :
– La règle : longue en bois léger, biseautée, en sapin ou noyer, très fragile. Soigner son fil afin qu’elle reste bien droite. Essuyer et nettoyer après usage.
Tenir la règle à filer entre l’index et le majeur, le pouce devant et la laisser décollée du support au maximum ; appui au bout. (voir photo)
– Les pinceaux sont nettoyés avec soin, et rangés bien soigneusement dans une trousse spéciale pour protéger le fil délicat des pinceaux.
. 2 brosses à filer synthétiques usé bombé.
. 2 ou 3 brosses à adoucir en putois, langue de chat ( petite à grande)
. 1 spalter pour adoucir les moulures composées.
. Chiffons en coton blanc propres
– La brosse à filer est chargée de la teinte avec soin, sans la maltraiter, pour garder le fil fin, maintenue avec légèreté du pouce et de l’index, en biais sur le fil de la règle ; poser la brosse et, en expirant, tranquillement, la tirer vers soi en la tenant avec légèreté, et surtout, sans l’appuyer. Le corps droit et les pieds bien ancrés. Le filet doit être régulier sur toute sa longueur, posé dessus ou dessous le trait, jamais « à cheval ».

2- Types de filets :
Le filet sec ou repiqué, le plus simple, pour simuler la moulure plate. Trait couvrant et régulier sur toute la longueur, fin ou épais selon la nécessité.
La demi-teinte, filet d’ombre transparent, fin ou large (plat du listel).
Le filet dégradé, pour simuler les profils arrondis, dégradé d’un seul côté (baguette, quart de rond, cavet, tore), ou des 2 côtés (talon, doucine, scotie), à l’aide de la brosse à adoucir, jamais chargée, mais au contraire souvent essuyée, afin de ne pas salir. Ces dégradés doivent être bien fondus.
L’ombre portée, se met sous la moulure et figure (comme son nom l’indique) l’ombre de la moulure (portée) sur la surface en dessous. Repiqué sec, plus foncé, puis adouci non pas comme un dégradé mais de façon à prolonger l’ombre.

Exécution
1. Le tracé : Etablir le profil de la moulure grandeur nature.
–  Il faut savoir dessiner ; copier ou créer un profil de moulure*.
– Il faut harmoniser les tailles des moulures sur l’ensemble du décor.
Reporter les mesures, par des petits points à distance de règle, puis faire un trait fin et léger.

2. Les teintes sont recherchées et préparées d’avance : la qualité de l’illusion de relief est obtenue par l’adéquation de la couleur et de la valeur des tons à celles des fausses matières sur lesquelles ils sont peints ; trop de contrastes, ou pas assez, nuisent à l’effet.
Glacis : Eau + retardant.
L’ombre repiqué, ton toujours couvrant : Blanc titane + Terre d’Ombre Naturelle + Noir d’ivoire (ou terre de Cassel) + ton du décor sur lequel est exécuté la moulure. (ex : ton vert, sur un faux marbre vert).
La demi-teinte, ton transparent : Terre d’Ombre Naturelle + Terre de Cassel (ou noir) + ton du décor.
L’ombre portée : ton du repiqué plus foncé (+ terre de Cassel).
La lumière, ton couvrant : Blanc de titane + jaune ou orangé (cadmium) + ton du décor.

3. Exécuter d’abord les repiqués d’ombres, secs ou dégradés, et les ½ teintes, horizontaux, puis verticaux. Les ombres doivent absolument, par la justesse des teintes, et des valeurs, donner l’illusion du relief de la moulure choisie.
Une fois les filets d’ombres terminés, exécuter les filets de lumières; jamais « à cheval » sur le trait de crayon (ce qui nuit à l’effet), mais bien juxtaposés, afin cette précision mette en valeur leur clarté.

4. La qualité de la moulure en cadre tient à la précision des finitions aux angles ; essuyer les bords de la moulure en biais bien net, afin que la coupe d’angle soit juste. Une défaillance d’un millimètre et les filets ne se raccordent pas, ce qui nuit à l’effet de relief.

5. Il faut harmoniser et équilibrer les tons ; respecter les valeurs adéquates sur l’ensemble du décor peint en trompe l’oeil.

Connaitre les conventions

Certaines conventions sont aujourd’hui acceptées.
– La moulure est une succession d’ombre et de lumière : Ce qui est en saillie reçoit la lumière. Ce qui est en creux est dans l’ombre. L’importance des valeurs des tons rend celle du volume : plus l’ombre est foncée et allongée plus profond est le creux, et inversement pour la lumière.
– La lumière vient du haut, de droite ou de gauche pour l’entièreté du décor. Dans une pièce, il faut tenir compte de l’arrivée de la lumière naturelle, de préférence, et changer d’un mur sur l’autre.
– Pour la réalisation en panneautage dans un appartement (Plus la pièce est haute, plus grandes sont les proportions des moulurations ; dans un château, ces tailles ne conviendraient évidement pas) : La hauteur moyenne d’un soubassement est de 80-85 cm, la largeur des champs (montants, traverses) de 9-10 cm, celle de la cimaise de 7-8 cm, et des moulures de 5-6,5 cm, la moulure de haut de plinthe de 1-1,8 cm.

Conclusion
La réalisation picturale, si elle n’est pas techniquement très compliquée, demande de la patience et du soin. La conception du projet aussi, demande du temps, pour les recherches des profils, tailles et tons adéquats. Mais, le résultat est à la mesure de l’effort ; très gratifiant.

Bien sûr, la base et la fierté du peintre décorateur, comme pour tout artiste peintre, est la nécessité de connaître et maîtriser les techniques picturales, de toujours s’entraîner et chercher à s’améliorer. Cependant, la qualité picturale ne suffit pas, le métier de peintre décorateur consiste avant tout dans la conception d’un décor peint en adéquation avec la demande et avec les contraintes du lieu. Et ceci, quel que soit l’importance du projet.*

* Voir : Profils et moulures. Ed. Vial