A l’occasion de l’exposition sur Mucha au Musée du Luxembourg, cet automne 2018, comment ne pas rendre hommage à l’héritage de Mucha, artiste peintre et peintre décorateur de l’Art Nouveau ? 

Artiste tchèque de renommée internationale, Alphonse Mucha (1860-1939) reste indissociable de l’image du Paris 1900. Sa célébrité lui vient surtout de ses élégantes affiches d’un style très affirmé, emblématique de l’Art nouveau. Mais son activité d’affichiste occulte trop souvent les autres aspects de sa production comportant aussi des peintures, des sculptures, des dessins, des décors, des objets d’art…

En effet, son immense succès lui vint de prime abord en tant que créateur et peintre décorateur, imposant son goût pour les arabesques, les motifs entrelacés : enroulements de chevelures dénouées, foisonnement de plis soyeux, de fleurs et de tiges stylisés  :
– la publicité (affiches et éditions des imprimeries F. Champenois)
– le théâtre (pour Sarah Bernhardt)
– le décors du  pavillon de la Bosnie Bosnie-Herzégovine lors de l’exposition Universelle de 1900
– éditions des « Documents décoratifs » et des « Figures décoratives » (Librairie centrale des Beaux-Arts, 1902)
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la création en 1901 des décors intérieurs et de la devanture la boutique Fouquet 6, rue Royale Paris. Décors transférés en 1926 au Musée Carnavalet.

« La nature, je l’étudie constamment. Il n’y a pas une plante, une fleur, un brin de vie qui ne soit pas plein de suggestion. » Cette déclaration de Mucha, souligne ses liens avec ses contemporains Hector Guimard et Émile Gallé. Feuillages, fleurs et boutons végétaux ornent les colonnes et boiseries, les frises, les meubles et jusqu’aux appliques lumineuses. Le vitrail joue un rôle important dans les décors Art nouveau : les verres irisés de la façade en offrent un exemple raffiné.

Depuis le début du XIXe siècle, les échanges entre le Japon et l’Occident se sont multipliés, provocant un véritable engouement pour l’art extrême-oriental. Compositions « japonisantes », décors de pivoines, chrysanthèmes, nénuphars se retrouvent chez nombre d’artistes européens. A ce répertoire appartiennent les fleurs flottant sur l’étang que dominent les magnifiques paons, motifs particulièrement en vogue.

La fin du XIXe siècle voit un profond changement dans les arts décoratifs.

Art nouveau, du nom de la galerie ouverte par le marchand Siegfried Bing en 1895, Style Moderne : les noms eux-mêmes révèlent la volonté de rompre avec le passé. Aux premières réalisations architecturales de Victor Horta, à Bruxelles, succèdent les courbes, l’asymétrie, les motifs végétaux des façades d’Hector Guimard en France, tandis que les recherches architecturales et esthétiques d’Antonio Gaudi vont révolutionner l’habitat et émerveiller jusqu’à nos jours (voir ses immeubles et la Sagrada Familia). Au nom de « l’unité de l’art », les arts décoratifs suivent le mouvement : l’École de Nancy et Émile Gallé tout à la fois céramiste, verrier, menuisier et ébéniste, ou encore le graphiste René Lalique créateur de bijoux arachnéens.

Au travers de toutes ces œuvres, c’est la figure d’un homme qui se dessine, mystique et visionnaire, animé d’une véritable pensée politique, à l’heure du renouveau national tchèque et de l’éclatement de l’Empire austro-hongrois. Tout le travail préparatoire pour L’Épopée slave qui l’occupe entre 1911 et 1928 témoigne de son attachement à son pays natal et de son rêve d’unité entre les peuples slaves.

Au-delà du maître de l’Art nouveau, c’est donc l’œuvre foisonnante et la personnalité singulière de cet artiste que l’exposition entend révéler aux visiteurs.